[RPG] Errance.

Isaac planta sa lance dans une lézarde du sol et s'étira de tout son long, les bras levés vers le ciel comme pour le crocheter entre ses doigt gantés de cuir. Un SDF grogna dans son sommeil, lourd d'alcool et de misère. Le rouquin récupéra son arme et reprit sa marche. La nuit allait bientôt tombé, et il s'était profondément enfoncé dans le labyrinthe des ruelles des bas-fonds. Il était prit d'une phase d'activité presque frénétique qui l'empêchait tout simplement de dormir.

Cela faisait quasiment trois jours qu'il errait ainsi, faisant de rares apparitions au Siège. Von Stein ne lui avait pas fait de remarque, car ces longues promenades n'étaient pas des pertes de temps. Les Bas Fonds étaient le nid de nombreux informateurs précieux, pour peu qu'on sache leur parler. En l'occurrence, la zone où il se rendait, renveloppé dans son grand manteau sombre, était l'une des moins fréquentable du coin.

Isaac s'arrêta brièvement, le temps de tirer sa capuche sur son visage, voilant ses cheveux trop caractéristique. Le soleil n'illuminait déjà plus les rues, et les rares réverbères qui n'étaient pas brisés dispensaient une lumière parcimonieuses sur les débris de seringues qui se brisaient sous ses talons. Il marqua une pause dans un rond de lumière, au aguets.

La jeune fille frissonna et rabattit son écharpe sur sa gorge. Elle n'avait pas l'habitude de sortir à cette heure là, et encore moins dans des quartiers pareils. A vrai dire, elle n'était pas trop rassurée. Et si elle se faisait agresser? Elle avait eu l'intelligence de ne pas prendre son sac Vuitton et de porter des habits plutôt classiques.

Il ne lui restait plus qu'à demander les services d'un professionnel. Elle comptait aller au Siège des Sbires, elle savait que c'était le meilleur endroit pour trouver ce qu'elle cherchait. Mais ... A l'heure actuelle, il lui semblait qu'elle s'était malheureusement égarée dans le dédale des rues de Curse Borough. Et elle n'avait pas eu l'idée de prendre un plan, étant donné qu'elle pensait que ça aurait été plus facile de se repérer ...
Mais ce n'était pas la première fois qu'elle se trompait.

Un crissement sous ses bottines la fit sursauter. Une seringue ... Ces bas fonds étaient un véritable repère de junkies. Quelle horreur! Comment pouvait-on s'injecter des substances illicites dans les veines par une piqûre? Et elle n'osait pas imaginer toutes les maladies qui devaient traîner dessus ... C'était dégoûtant.
Sa peur de l'inconnu augmentait peu à peu. D'ailleurs, elle commençait à imaginer les pires scénarios possibles ... Par exemple, quelqu'un pourrait très bien la suivre pour l'agresser ... Elle pouvait presque entendre des pas résonnant sur le goudron défoncé ...

Etait-ce vraiment son imagination? Elle jeta un coup d'oeil furtif au dessus de son épaule ... Et s'aperçut qu'une silhouette se tenait au centre de la voie. Elle ne pouvait voir son visage, mais elle avait l'impression de sentir son regard sur elle ... Un regard de convoitise ...
La jeune fille se mit à crier, et prit ses jambes à son cou. Elle n'osa pas se retourner à nouveau, de peur de trébucher ... Mais les pas derrière elle se rapprochaient, de plus en plus ...
Elle prit à droite au croisement, puis à gauche, et encore à gauche ... Son poursuiveur ne comptait pas la laisser tranquille.
Quel dommage, elle déboucha tout à coup dans un cul de sac. Comme dans les pires films d'horreur où l'héroïne se faisait massacrer ...
L'homme s'approcha d'elle d'un pas lent. Il savait sa proie prise au piège et bientôt à la panique ... Il était grand et semblait plutôt costaud. Elle allait passer un sale quart d'heure ... Elle se mit à hurler de plus belle, sachant qu'elle n'avait plus tellement d'espoir ...

Isaac s'apprêtait à reprendre sa route lorsqu'un cri brisa le calme des rues. Un signal pour la curée? La voix était féminine... De toutes manière, il allait dans cette direction alors... Il reprit sa marche, silencieux. Le hurlement reprit, tout proche. Le rouquin soupira. la propriétaire de cette voix allait lui faire perdre sa nuit. Il obliqua vers le cul de sac, marchant à pas feutré. Un homme, presque aussi grand que lui, avait acculée un jeune femme au fond de l'impasse. C'était elle qui criait. Qu'est ce qu'une petite oie blanche faisait dans ce quartier? A cette heure qui plus est... Le Sbire,, poussé par la curiosité, entra dans la ruelle, évitant l'éclat du réverbère, son manteau frôlant le mur en chuintant. Il se glissa derrière l'homme, le poussant du bout de sa lance.

"Désolé mon vieux, changement de programme..."

L'homme se retourna, fixant celui qui osait le déranger. Le visage de son adversaire était invisible, aussi il n'hésita pas à attaquer. Grossière erreur. Isaac l'attendait. Il évita la charge en pivotant sur le côté, comme l'aurait fait un toréador, et frappa l'homme dans le dos, juste assez fort pour l'énerver. L'autre se retourna en grognant, fonçant à nouveau vers le rouquin, l'éclat d'un couteau dans la main droite. Isaac attendit l'ultime instant pour faire un pas sur le côté et assommer son adversaire d'un coup de coude, emporté par le mouvement, la capuche couvrant son visage et ses cheveux tomba. Le couteau tinta sur le sol. Ils auraient une petite conversation plus tard... Isaac se tourna vers la jeune femme.

"Bonsoir... Êtes vous à ce point avide de sensations fortes pour vous perdre ainsi dans ces taudis? Ou bien avez vous une bonne raison de risquer ainsi votre vie?"

Le coeur de la jeune fille ne cessait de battre, menaçant de transpercer sa poitrine. Etait-elle sauvée, ou son mystérieux bienfaiteur allait lui aussi l'agresser ...
Non, il n'en avait pas l'air. Au contraire, elle fut plutôt rassurée par le son de sa voix ... Mais sa question était assez embarrassante.

- Je suis désolée ... Je ne comptais pas causer tant de dérangement. Vous deviez être occupé ailleurs. Mais ... merci quand même.

Cet homme ... Il était plutôt fort. Peut être était-ce l'un de ces types dont elle avait besoin! Au moins elle n'avait pas à aller jusqu'au Siège. Mais s'il ne l'était pas ... Tant pis, elle lui demanderait quand même! S'il échouait, ce n'était pas si grave que ça. Elle prit la décision d'être directe.

- Vous me paraissez très fort ... Dites moi, êtes-vous un Sbire?

Son ton avait retrouvé toute l'assurance dont elle était capable, après un passage à vide dans les rues des Bas Fonds. Maintenant, les choses sérieuses commençaient ... Elle ne pouvait plus reculer. Mais cette décision, elle l'avait déjà prise avant.

[C'est pas long mais ... jveux pas aller trop vite. :p]

Isaac fixa la jeune femme, comme s'il voulait la clouer sur place. Ses yeux dorés reflétaient la lumière du réverbère comme l'auraient fait ceux d'un chat. Cette fille aiguisait sa curiosité. Sa politesse confirmait son hypothèse, ce n'était vraiment pas une gamine des rues. Elle avait été élevée dans le coton, dans le monde clos et sucré de l'argent. L'autre ne bougeait pas. Il y était peut-être allé un peu fort. Tant pis, il ne manquera certainement pas à qui que ce soit. Le plus intéressant pour l'instant, c'était cette fille. Qui posait les bonne questions. A priori, il ne courrait pas énormément de risque à lui dire la vérité. Cependant, il avait déjà vu, voir organisé des pièges encore plus tordu. Il se tenait donc raisonnablement sur ses gardes, avec un sourire légèrement moqueur.

"Et si c'était le cas, en quoi cela change-t-il quoi que ce soit?"

Il fit un imperceptible mouvement, prêt à toutes éventualité. Peut-être était il devenu légèrement paranoïaque...

L'homme qui lui faisait face avait des yeux magnifiques. Des yeux de félins, des yeux de chasseur. De sa capuche dépassaient quelques cheveux couleur feu ... Quelqu'un qui ne passait pas inaperçu. C'était peut être un mauvais point pour lui ... Qu'importe. Elle devait tout de même tenter le coup.
Il était plus puissant qu'elle, et venait de la sauver, certes. Mais elle ne comptait quand même pas se laisser impressionner ... Elle comptait lui montrer qu'outre sa faiblesse apparente, elle pouvait être capable de beaucoup d'aplomb. Après tout, elle était son futur employeur, elle devait essayer d'imposer le respect autant que faire se peut ...

- Cela change que j'aurais la certitude que vous êtes un spécialiste. Un simple tueur à gages pourrait s'en sortir ... Mais un Sbire serait largement plus efficace. Bien entendu, la prime va de paire avec l'aptitude. Si vous êtes un Sbire, mon porte monnaie vous sera plus ouvert. Pas maintenant bien sûr, d'abord notre marché. Je ne me suis pas risquée ici avec l'intégralité de mon compte en banque dans ma poche, je ne suis tout de même pas si suicidaire ... Alors, je répète ma question: êtes vous un subordonné de Von Stein? N'essayez pas de me mentir, je sais qu'un Sbire doit se faire tatouer un scorpion sur la hanche ...

Elle planta son regard dans celui de l'homme qui lui faisait face, sans flancher. Au fond d'elle même, elle était tendue, mais elle pensait savoir ce qu'elle faisait, tout de même.

Isaac ne lâcha pas la jeune femme du regard, tandis qu'elle se redressait, énonçant ce qui l'avait poussée à venir dans ces rues malfamées. Elle voulait un tueur? Elle n'allait pas être déçue. Le rouquin fixa la jeune femme avec ironie, riant doucement. Il se mit à lui tourner autour, lentement, faisant sonner ses talons sur le sol. La faune nocturne des bas-fonds passait sans s'arrêter, évitant la lumière, faisant bruisser l'ombre.

Isaac se glissa entre elle et la sortie, une lueur étrange au fond des yeux. Il voulait qu'elle doute, il voulait qu'elle ait peur. Il se rapprocha d'elle, la dominant de toute sa taille. Avec une lenteur calculée, il dégrafa son manteau, et l'ôta d'un geste de prestidigitateur, dévoilant son torse tatoué. Son pantalon de cuir lui arrivant justement au hanche, et un regard attentif et averti aurait peut-être reconnu dans une spirale légèrement isolée, sur sa hanche gauche, l'aiguillon du scorpion. Isaac croisa nonchalamment les bras, souriant avec une ironie palpable.

"Suis-je un Sbire? C'est une bonne question. Et si vous trouviez la réponse toute seule, comme une grande?"

Aura-t-elle assez de cran? Sinon... Tant pis pour elle.

Il voulait la tester? D'accord. Elle avait l'intuition qu'il ne lui ferait pas plus de mal que ça ... Il était plutôt bien fait, mais elle n'avait pas le temps pour ce genre de choses. Pas maintenant, tout du moins. Et puis, faire ça avec un Sbire ... Ce n'était pas trop son genre, de tomber aussi bas. Peut être en tant que garde du corps ... Le sien était tellement "compétent" qu'il l'avait laissée s'enfuir du domicile familial ...

Le tatouage des Sbires était sensé être situé sur la hanche gauche. En posant ses yeux sur cette partie du corps du jeune homme, elle aperçut un motif noir ... Mais était-ce vraiment un scorpion? Le regard doré était teinté d'ironie. Elle allait relever le défi ... Il ne lui faisait plus peur. Malgré tout, son coeur battait la chamade.
Elle avança sa main vers sa hanche, toujours méfiante. Mais bon, il n'allait pas la manger, le cannibalisme n'était pas à la mode dans les Bas Fonds en ce moment ... D'un geste sûr, elle posa ses doigts sur le cuir, et fit glisser son pantalon vers le bas, sans se démonter. Le tatouage lui apparut dans toute sa splendeur. Elle releva les yeux vers le rouquin, avec un sourire de défi. Elle comptait lui faire payer cet affront, par un peu d'argent retiré sur sa prime.

- Ainsi, vous êtes l'un d'eux ... C'est parfait. J'ai besoin d'un traqueur ... Laissez moi vous expliquer la situation.

Elle s'aperçut alors qu'elle avait omis de retirer ses doigts du pantalon de cuir ... Elle les retira avec une grimace un peu renfrognée. Quelles manières ... Ca ne se faisait pas. Heureusement qu'il ne s'agissait pas d'une soirée mondaine, elle aurait eu honte. Mais quel invité lui aurait demandé de le déshabiller?

- Je m'appelle Joy-Alice Feldback. Je vous dis cela, car mon nom ne vous est peut être pas inconnu ... Feldback & Co, la célèbre industrie informatique. Vous vous en doutez, il s'agit de mon père. Sa fortune est ... immense.

Elle marqua une pause, pour s'assurer qu'Isaac avait bien compris les sous-entendus. Elle reprit:

- Mais pas seulement sa fortune. Son tableau de chasse également. Je n'ai que 17 ans mais je suis déjà au courant de bien des choses, ils ne savent pas que je sais une grande partie de la vérité. Ma mère commence à se faire vieille, malgré les vitamines, les salles de gym et les liftings à répétition. Alors, mon très cher père préfère ses blondes secrétaires ... Jusqu'à maintenant, ce n'était que du "simple" adultère. Rien de très grave, je soupçonne que ma mère n'est pas très fidèle de son côté, non plus. Bref. Mais cette fois ci, c'est différent ... Mon père est vraiment tombé amoureux. Il veut demander le divorce. Ma mère n'est pas sur la paille non plus, mais l'héritage paternel est préférable ... Il ne nous a jamais beaucoup aimés, mon frère et moi. Alors ... Il a décidé de nous déshériter. Il nous affirmera le contraire, mais lorsqu'il était dans son bureau, j'ai entendu une conversation téléphonique avec son notaire. Il veut tout donner à sa maîtresse. Cette sorcière, je ne sais pas ce qu'elle lui a fait, mais à mon avis elle aime plus son compte en banque que lui même.

Une fois de plus, elle marqua une pause. Ce fut pour parfaire l'intensité de son regard.

- Alors, voilà ce que je vous demande ... Tuez mon père avant qu'il ne change son testament. L'argent sera toujours pour nous ... Je pense que c'est dans vos cordes. Ah, et une dernière chose ...

Elle se rapprocha de lui, pour lui murmurer à l'oreille:

- Si je fais appel à vous, c'est bien entendu parce que mon père est un Morph ... L'Elu du Dieu Cerf. Je suppose que ça vous aide beaucoup ... Je vous en offre 2 000 000 de Moyins.

Allait-il accepter? Elle espérait qu'il n'avait pas un emploi du temps trop chargé ces temps ci ...

Elle avait un peu plus de cran qu'il ne l'avait pensé. Tant mieux. Elle semblait fière de son audace,il lui décocha un regard amusé sans faire de commentaire. Il n'en fit pas plus lorsqu'elle oublia ses doigts sur lui. Par contre, son sourire presque irritant s'agrandit lorsqu'elle les retira, grimaçante. Son identité était prodigieusement intéressante... Son supposé père était effectivement une des plus grande fortune du coin, avec quelques Sbires bien entendu. Cependant, même s'il l'écoutant attentivement -qu'avait il à perdre après tout?- Isaac était raisonnablement septique. Cette fille avait de l'aplomb, mais elle était sans doute tout à fait capable de mentir comme une arracheuse de dents.

Il suffisait de quelques détails pour rendre une histoire crédible, un chasseur, a plus forte raison un manipulateur comme lui était bien placé pour le savoir. A la fin de sa tirade, la rouquin fixa Joy, comme s'il soupesait mentalement sa proposition. Avec nonchalance, il décroisa les bras, le manche de sa lance tintant légèrement en frôlant le sol. Un simple geste, et il pouvait la réduire à sa merci. Avec délicatesse, il lui saisit le menton, plongeant son regard dans le sien.

"Le marché est alléchant... Mais qu'est qui me dit que vous n'êtes pas une misérable petite affabulatrice?"

Joy-Alice prit une grande inspiration pour ne pas s'énerver lorsqu'il lui saisit le menton. Ce geste n'avait rien de brutal, au contraire, mais elle n'avait pas l'habitude que des inconnus se permettent de tels gestes intimes ... Elle faillit retirer violemment la main de l'homme avec un sec "Ne me touchez pas". Mais elle saisit qu'il fallait tout de même le caresser dans le sens du poil. Après tout, sans lui, elle se serait faite agresser.

Bon, il voulait une preuve de sa bonne foi ... Quoi, il voulait voir sa carte d'identité? Non, ce n'était peut être pas le problème ... Il fallait donc lui prouver sa situation ... Ca allait être compliqué.

- Pourquoi vous mentirais-je? Je sais que si je m'en prends personnellement à un Sbire, je me mets à dos toute l'Organisation. Ce n'est pas mon but. Ecoutez, si vous ne me croyez vraiment pas, allez voir le notaire en question .. Secret professionnel ou pas, je vous fais confiance pour vous montrer persuasif. Son nom, c'est Kaleski. Libre à vous de faire ce petit détour ou de me croire directement ...

Elle ne pouvait pas faire mieux, comme preuve de sa bonne foi.

Isaac la sentit se raidir. Son geste était pour elle visiblement déplacé, mais elle était suffisamment intelligente pour ne pas le repousser franchement. Il savoura son inconfort quelques instant puis la lâcha, avec un sourire en coin. Il la considéra plusieurs minutes, silencieux, avec ce sourire irritant agrafé au visage. Cette histoire méritait qu'on s'y intéresse.

Le rouquin réfléchissait, sans se presser. Après tout, pourquoi pas? Ils étaient au point mort dans l'enquête sur le meurtre de leur ancien chef, et il n'avait pas de contrat officiel depuis quelques temps... Il pouvait bien en accorder un peu à cette fille... Quitte à lui faire payer s'il le perdait. Il recula légèrement, bloquant toujours le chemin vers la sortie.

"Correction. Vous allez être persuasive, car c'est vous qui aller me permettre de le voir..."

Il était calme, sûr de lui. Pourquoi pas? Elle était pas vraiment en position de discuter.

Zut ... Elle sentait qu'elle perdait peu à peu le contrôle de la situation. Ce n'était pas bon, mais vraiment pas bon du tout. Elle n'allait quand même pas se laisser faire par un criminel ...
Mais pour l'instant, il bloquait le passage, alors elle n'avait pas le choix. Elle réfléchirait plus tard.

- C'est moi qui vais vous permettre de le voir .. Vous voulez qu'on y aille tous les deux ... Excusez moi, mais je préfèrerais qu'il ne pense pas que je suis impliquée dans cette affaire. Après tout, c'est vous qui ne me croyez pas ... Bon, sinon, il y a une autre solution, c'est de voler les dossiers concernant mon père dans le cabinet de Kaleski. Tout de même ... Je trouve que nous perdons du temps. Je peux savoir pourquoi vous ne me croyez pas? Franchement, aurais-je pris le risque de venir dans Curse Borough pour rien?

Elle commençait à se demander si elle avait bien fait de tomber sur ce Sbire trop méfiant ... Elle n'aimait pas les duels psychologiques à armes égales. Ce qui revenait à dire qu'elle n'aimait pas faire affaire avec des gens trop intelligents. Elle préférait tant tout maîtriser ...

Isaac tendit l'oreille, laissant la jeune femme parler dans le vide quelque instant. Des crissement, non loin de leur impasse... Le menu fretin se sauvait, comme les petits poisson fuyant fasse à un animal bien plus gros. Le rouquin se renconcentra sur la jeune fille. Son maintien avec changé. Il était en alerte, tenant fermement sa lance. Il était franchement moqueur lorsqu'il reprit la parole.

"Pour rien? Ce n'est pas ce que j'ai dit... Qui sait? Vous êtes peut-être comme l'un de ces écervelés qui pense ainsi prouver leur courage et leur esprit rebelle... Les mêmes que nous retrouvons au mieux égorgés sur le pas de notre porte."

Le silence c'était fait, tombant comme une chape sur Curse Borough. Cette fois, il en était sûr, les prédateurs étaient de sortie... Isaac s'enveloppa à nouveau dans son manteau Sombre, presque indécelable sans le halo du réverbère derrière lui. Un simple pas, et il disparaissait dans l'ombre, comme s'il n'avait jamais été là. Il était sans doute un peu timbré, mais pas stupide au point de se laisser entrainer dans un combat face à toute la vermine des bas-fonds réuni. Il était cependant résolu à donner son accord à la jeune fille. Si elle disait vrai, son compte en banque sera heureux. Sinon, il s'occuperait d'elle, et il comptait bien lui faire regretter l(homme qui avait faillit l'agresser.

"Les taudis deviennent infréquentables..."

L'amusement perçait dans sa voix. Il était quasiment chez lui ici. Curse Borough allait sans doute recevoir son quota de sacrifices cette nuit...

Cet homme commençait à l'exaspérer. Vraiment. Pourquoi cet air moqueur et hautain? C'était elle qui prenait les gens de haut, pas le contraire. Elle, elle était Joy-Alice Feldback. Elle était jeune, belle, riche, intelligente. Elle n'avait rien à envier au commun des mortels. C'était quelqu'un qui imposait le respect, un point c'est tout!

- Courage? Esprit rebelle? Vous pensez que j'ai vraiment besoin de ça ... Bon, ce que je vous propose, c'est de quitter cet endroit mal famé. Excusez moi si je ne suis pas habitué à fréquenter ce genre de quartier. Je voudrais que l'on négocie dans un endroit sympathique, avant que l'on se fasse agresser de nouveau. Etes-vous déjà allé au Gold Palace? Je ne sais pas si c'est vraiment dans vos habitudes, mais en tout cas c'est dans les miennes.

Elle détailla les habits de l'homme: ils n'étaient pas vraiment dans le genre de la maison, bien qu'ils aient au moins le mérite de ne pas être sales et déchirés ... Mais rien de grave, on lui passait tout là bas. Après tout, elle était leur meilleure cliente. Elle avait même réussi à faire embaucher son cousin en tant que cuisinier, lui qui était près de partir en vrille car il n'était même pas capable de suivre des études correctement. Mais malgré tout, elle l'appréciait, c'était un brave type. Et une bonne partie du restaurant reposait sur ses épaules, bien qu'il n'en soit pas le principal gérant.

- Je vous invite, ça va de soi. Si vous voulez, je peux même vous offrir une nuit dans la suite présidentielle, en gage de remerciement. A vous de choisir, vous avez le droit de refuser ...

Quoi? Elle avait tellement d'argent sur son compte en banque qu'elle pouvait bien se permettre un petit écart de ce genre ... Rien de grave après tout. Mais quand même, l'idée était étrange. Offrir un tel luxe à un truand ... Bah, elle se fichait bien du regard des gens. Ils étaient si facilement achetables ... En cas de scandale, il lui suffirait de payer, et de demander à la presse d'étouffer l'affaire. Rien de plus facile.

Le Gold Palace? Eh bien, cela valait le coup de l'énerver! Les rares fois où il avait poussé la porte, il n'avait pas été déçu. Le rouquin rendit son regard scrutateur à la jeune femme, s'attardant volontairement sur ses courbes. Il la fixa à nouveau dans les yeux avec un sourire moqueur.

Elle avait voulu l'impressionner en lui proposant cela, et bien, elle en était pour ses frais. Le Sbire recula lentement, disparaissant dans l'ombre. Il avait eut une soudain et irrépressible en de lui faire peur. De lui apprendre que le pouvoir de l'argent ne fait pas tout. Silencieusement, il la contourna, se glissant dans son dos, de plus en plus près. D'une voix veloutée, il lui glissa au creux de l'oreille:

"Et si je vous abandonnais ici... Sans défenses... Seule..."

Il marqua une pause, puis reprit avec ironie:

"Heureusement pour vous, je suis d'une effroyable cupidité. Vous avez dit le Gold Palace? Hm?"

Elle commençait à le cerner, du moins une partie de sa pesonnalité. Aussi ne flancha-t-elle pas lorsqu'il lui proposa de la laisser seule dans le quartier ... Il venait de la sauver, elle lui offrait presque de l'argent, et elle venait de l'inviter dans le restaurant le plus chic de la ville; pourquoi l'abandonnerait-il? Il fallait vraiment avoir un QI inférieur à 90 pour réagir de la sorte. C'était juste pour l'impressionner. Et elle avait raison ...

- Oui, le Gold Palace. Ca ne me dérange pas, vous savez. Pas le moins du monde.

Pas la peine d'entrer dans les détails non plus. Elle était capable de l'acheter. Tout se paye dans la vie .... Et puis là bas, elle était dans son élément.

- Alors, nous y allons?

Isaac s'amusait beaucoup de cette gamine, qui semblait persuadée que tout pouvais s'acheter. En l'occurrence, il n'était pas vraiment un bon exemple, mais passons. Dégageant ses bras de son manteau, il assura sa prise sur sa lance et avança vers l'extrémité de la ruelle. Rien à signaler. Il se tourna vers la jeune fille et lui fit une profonde révérence, ironique au possible, la main posée sur la poitrine, un mince sourire en biais.

"Si vous vous donniez la peine de me suivre, mademoiselle..."

Il se redressa et l'attendit, aparament nonchalant, mais prêt à faire face à toutes éventualités. A cette heure, relâcher sa vigilance serai suicidaire...

Ce soudain accès de politesse parodiée fit sourire Joy-Alice. Il n'avait rien d'un gentleman, et jouer ainsi la comédie était plutôt ... comique. Ce n'était pas la peine de réagir à son ironie ... Comment, d'ailleurs? En lui disant "ne vous moquez pas de moi !!!" en sautant furieusement sur place et en serrant les poings? Elle avait passé l'âge des caprices ...

- Et bien allons-y .... très cher.

Elle n'avait plus qu'une envie, quitter ce quartier peu accueillant ... Elle engagea le pas, et tous deux se dirigèrent vers les lumières de la ville ...

[Allez, nouveau topic :p Je m'y mets tout de suite ^^]